Reconnus comme naturels, les traitements à base de cuivre sont utilisés contre des maladies comme le mildiou ou la nécrose bactérienne, deux des maladies les plus courantes dans le domaine viticole. Et ils sont notamment utilisés en agriculture biologique, car autorisés par la réglementation. Mais quelle en est la réelle utilisation ? Et surtout, y a-t-il un problème caché avec ce type de traitements ?
L’utilisation du cuivre dans la viticulture
Il faut tout d'abord savoir que le cuivre est un produit préventif uniquement. En effet, il va intervenir dans le métabolisme de la vigne elle-même en renforçant ses défenses. Le traitement à base de cuivre est appliqué à la fin de l'hiver, ou au tout début du printemps, juste avant la reprise de la végétation.
Petit bémol sur ce type de traitements : une partie importante du cuivre, entre 30 et 40%, est lessivée après une vingtaine de minutes de pluie. Il est nécessaire de renouveler le traitement un certain nombre de fois pour le rendre le plus efficace possible.
Que dit la réglementation sur l’utilisation du cuivre dans la viticulture ?
Le cuivre est naturellement présent sur notre planète, certes. Pour autant, le cuivre dans la viticulture crée polémique car il est jugé trop polluant. Selon les doses de cuivre utilisées, il peut être très toxique pour les micro-organismes présents dans le sol. Autre souci non négligeable : il n’est pas biodégradable, ou très peu. Il restera donc toujours une trace de cuivre dans l'environnement où il a été un jour présent.
Depuis peu, le cuivre est la cible des autorités européennes. En effet, en février 2019, une nouvelle réglementation européenne voit le jour, et impose une diminution de l’utilisation de ce métal. Pour vous donner quelques chiffres : avant cette nouvelle règle, les viticulteurs étaient autorisés à utiliser le cuivre à hauteur de 6 kg par hectare et par an, et ceci lissé sur 5 ans. C’est-à-dire une utilisation modulée sur 5 ans qui ne dépasse pas les 30 kg par hectare. Or, depuis février 2019, cette utilisation est limitée à 4 kg par hectare et par an, lissée cette fois-ci sur 7 ans. On ne doit plus dépasser les 28 kg par hectare sur 7 ans. Un durcissement qui n’a pas fait que des heureux, mais qui, pour sûr, est bonne chose pour notre environnement.
Mais pourquoi ? Pourquoi le cuivre en viticulture est-il dangereux ? Le cuivre se lie aux plantes et micro-organismes de l'environnement dans lequel il se trouve. Et de par sa non-biodégradabilité, il ne disparaît jamais vraiment. Ceci étant, il reste dans son environnement relativement proche. Il ne pénètre donc jamais dans les nappes phréatiques, ce qui est tout de même une bonne nouvelle. Néanmoins, il s'accumule et détruit le sol, pouvant le rendre à long terme presque stérile. On le voit clairement dans les zones entourant des industries rejetant du cuivre. En effet, très peu de plantes parviennent à y survivre et y pousser. Mais le cuivre peut également empoisonner les animaux. Les moutons, par exemple, dont l'empoisonnement au cuivre survient même à faibles doses, souffrent énormément des effets nocifs de ce métal. Il a aussi un impact dévastateur sur les vers de terre vivant dans le sol, et influence sérieusement le cycle de décomposition.
A priori, il n'y aurait pas de risques sur l'être humain buvant du vin qui a été traité au cuivre. Le seuil de toxicité chez l'homme est d'environ 10 mg/jour. Il faudrait boire quelques litres de vin par jour, et pendant plusieurs jours, avant d'en voir les effets toxiques sur notre organisme. Concrètement, on a plus de risques d'en souffrir par l'alimentation (source principale d'exposition au cuivre) et l'eau potable courante.
Vous l'aurez compris, l'inquiétude à avoir est donc principalement sur l'environnement et la biodiversité.
Et en l’agriculture biologique ?
Comme nous l'avons évoqué en introduction, les traitements par le cuivre sont autorisés dans le cahier des charges de l'agriculture biologique. Néanmoins, les doses de cuivre autorisées sont déjà bien en dessous des normes autorisées en viticulture traditionnelle. Pour rappel, la norme mise en place en 2019 limite l'utilisation du cuivre à 4 kg par hectare et par an, lissée sur 7 ans. Soit 28 kg maximum de cuivre par hectare sur 7 ans. Les vignerons en agriculture biologique n'ont pas été impactés par cette nouvelle réglementation, puisque le cahier des charges imposait déjà des doses de cuivre inférieures. La limite est déjà à 3 kg par hectare lissé sur 5 ans, c’est-à-dire pas plus de 15 kg par hectare pour 5 années.
Il y a un "mais". En effet, le dernier rapport de l’ANSES (l’Agence nationale de sécurité de l’alimentation, de l’environnement et du travail) publié le 17 mars 2020, révèle quelques données étonnantes. Les chiffres évoqués ont été recueillis en 2016, avant même que la nouvelle réglementation européenne paraisse. La quantité cuivre utilisée par hectare serait deux à trois fois plus élevée en agriculture biologique qu’en agriculture conventionnelle. Le cuivre serait utilisé sur 98% des vignes en agriculture biologique, alors qu’il n’est utilisé que sur 85% des vignes en agriculture conventionnelle.
Enfin, sur les 957 tonnes de cuivre utilisées sur les vignes en 2016, 174 ont été utilisées sur les vignes en agriculture biologique. Cela représente 18% de l’utilisation totale du cuivre, alors qu’à ce moment-là, seulement 9% du vignoble français était en agriculture biologique.
Dans son rapport, l’ANSES estime que si nous atteignons l’objectif qui vise à avoir 15% des surfaces viticoles françaises en agriculture biologique, cela aurait impact significatif sur l’utilisation du cuivre. En effet, cela entraînerait une augmentation de près de 140 tonnes de cuivre, soit +14% par rapport à l’année 2016. Cela est sûrement dû au fait que le cuivre est un substitut à d'autres traitements et pesticides, eux-mêmes interdis en agriculture biologique. Les viticultures en bio se rabattent ainsi sur le cuivre. Mais, finalement, le cuivre dans la viticulture, est-ce une bonne ou une mauvaise chose ?
En conclusion, il est vrai que le cuivre est un élément naturel. Et il est sûrement bien meilleur que la majorité des pesticides. Mais il est tout de même important de garder en tête l'aspect toxique du cuivre. Et d’avoir une utilisation raisonnée et maîtrisée de ce métal lourd, très peu biodégradable et fortement toxique pour son environnement.