Les évènements climatiques "exceptionnels", tels que le gel ou la canicule, se se multiplient, et deviendront même peut-être un jour courants. Le climat devient de plus en plus chaud, et surtout de moins en moins stable. Ces évènements climatiques auront des conséquences sur les vignes et les vignobles de France et du monde. Alors, quel avenir pour les vignes dans ce contexte de changement climatique ?
Quel rôle joue le changement climatique ?
Tout d'abord, l'augmentation de la température impacte les vignobles. En effet, les hivers sont globalement de plus en plus doux, et les étés de plus en plus chauds. Cela entraîne notamment une anticipation de tous les stades du développement de la vigne. Par rapport aux années 1980, la période de débourrement (période où les bourgeons s'ouvrent et libèrent les premières feuilles) a avancé d'une semaine. La période des vendanges quant à elle, et donc la maturité des raisins, a avancé de deux à trois semaines depuis les années 1980.
Le deuxième élément majeur qui présente un risque pour nos vignes est la modification de la pluviométrie. En effet, les températures de plus en plus élevées provoque un besoin en eau de plus en plus important pour les vignes, sans que l'on puisse répondre à ce besoin. La vigne est alors confrontée à un déficit hydrique, en particulier dans le sud de la France.
Ensuite, les phénomènes extrêmes, auparavant exceptionnels, se multiplient. Les canicules, les coups de chaleur ou encore les pluies torrentielles peuvent détruire les vignes et les sols. Les épisodes de gel, quant à eux, devraient diminuer, mais ils pourraient aussi arriver un peu plus tard. Le débourrement arrivant plus tôt, la vigne sera potentiellement plus vulnérable à ces épisodes de gel tardifs. Quant aux coups de chaleur, ils sont également dangereux. En juin 2019, dans le Gard et dans l'Hérault, il a fait pendant plusieurs heures une température supérieure à 46°C. Ces températures élevées peuvent griller les feuilles et les grappes et de fait complètement détruire la récolte. Le problème de ces épisodes, c'est qu'ils sont de plus en plus imprévisibles.
Enfin, le dernier élément qui impacte la production de vin regroupe tous les impacts sur les écosystèmes et la biodiversité. Les champignons, les paysages environnants, les incendies qui se multiplient... tout cela joue sur le vin.
Quels impacts sur le vin ?
Le premier impact du changement climatique sur le vin, et le plus simple à comprendre, est le rendement. L'élévation des températures, voire la sécheresse, associé au manque d'eau ne permet pas aux baies de se développer totalement : les raisins sont plus petits, et donnent donc moins de jus.
Contrairement à ce que l'on pourrait penser de prime abord, le changement climatique a aussi des conséquences importantes sur le goût et donc la qualité du vin. Le climat impacte la composition du raisin lui-même : le taux de sucre dans les baies augmente, tandis que la quantité d'acide malique diminue. Plus le taux de sucre est haut et plus le taux d'alcool est haut. Dans les années 1980, les vins produits en Languedoc avaient en moyenne un taux d'alcool de 11°, tandis qu'aujourd'hui, la moyenne est de 14°. Bien sûr, cette augmentation du taux d'alcool n'est pas complètement liée au changement climatique, mais les experts estiment que pour la moitié, c'est le cas.
Quelles sont les régions les plus impactées ?
Pour le moment, en France, le Sud est la région la plus impactée par le changement climatique. Le climat méditerranéen des régions Languedoc-Roussillon et Provence caractérisé par des hivers doux, des étés secs et de fortes pluies, va s'accentuer. Les vignerons vont devoir s'adapter, pour maintenir les vignobles. Certains vignerons connaissent déjà les leviers et pratiques certaines techniques pour limiter les conséquences du changement climatique.
Les régions du Sud-Ouest, pourraient à termes basculer dans un climat de type méditerranéen. Les vignerons n'auront donc pas d'autres choix que de s'adapter. Les régions de l'Est et du Nord-Est, comme l'Alsace, vont également voir leurs températures augmenter fortement.
La région de Bordeaux quant à elle, de part sa proximité avec l'océan atlantique, ne devrait pas subir de trop fort changement de températures. Cependant, les épisodes de fortes grêles devraient devenir plus fréquents.
D'autres régions vont peut-être voir s'ouvrir le potentiel de planter des vignes. La Bretagne par exemple, avec une projection de +3 à +4°C d'ici 2070 pourrait devenir une terre viticole. Les premiers vignobles bretons pourraient ainsi voir le jour rapidement. L'Angleterre, l'Allemagne ou encore la Pologne et la Russie, pourraient également devenir des terres viticoles et produire plus de vins.
Néanmoins, certaines régions viticoles pourraient à termes disparaître... Le Sud de l'Espagne pourrait connaître des conditions climatiques rendant de plus en plus difficile la culture de la vigne la production de vin.
Quels sont les leviers d'adaptation ?
Des modifications d'encépagement sont à l'étude et seront sûrement à prévoir. Les vignerons vont devoir s'orienter et privilégier des cépages plus résistants à la sécheresse et plus tardifs, pour lutter contre l'avancée des stades du développement de la vigne, et repousser les vendanges. A termes, il faudra peut-être se tourner vers des cépages d'autres régions viticoles, voire même d'autres pays. Le changement climatique risque de bouleverser notre système des appellations d'origines protégées (AOP et AOC), très lié aux cépages et aux pratiques de chaque terroir.
Un autre levier d'adaptation serait également de modifier la densité des vignes. Avec une densité plus faible, la vigne a accès à plus d'eau. Cela aura néanmoins l'inconvénient de diminuer fortement le rendement à l'hectare. Et notamment dans des régions comme la Bourgogne où le prix de l'hectare est très élevé.
Les vignerons vont sûrement devoir revoir leur gestion des sols, afin de renforcer la rétention d'eau. C'est déjà le cas à Santorin, par exemple, qui est une région viticole à très faible pluviométrie. Les vignes sont au ras du sol et dans une configuration de "gobelets en couronne" qui permet de collecter l'eau dans le sol volcanique, et assurer une meilleure retenue et redistribution de l'humidité.
L'agroforesterie peut également être une solution. Ce mode d'exploitation consiste à associer des arbres en bordure ou même au milieu d'une parcelle de vignes. Les arbres jouent un rôle de tampon très efficace au changement climatique.
On parle beaucoup de la vigne, mais on peut aussi imaginer des changements dans les méthodes œnologiques. Il sera peut-être nécessaire de retirer de l'alcool, d'acidifier le vin, ou encore d'utiliser des levures, moins efficaces pour transformer le sucre en alcool mais plus efficaces pour développer certains arômes.
En conclusion
Globalement, en France, à l'horizon 2070 - 2100, nous pourrons continuer à produire du vin. C'est une bonne nouvelle ! Et ce, même dans le Sud de la France, même si les vignerons vont devoir s'adapter car ils ne pourront conserver leur rendement actuel. La compensation de la baisse de rendement se traduira sûrement dans un premier temps par une meilleure valorisation du vin et donc une augmentation du prix.
Mais une chose est sûre : il faut se préparer... des changements sont à prévoir !